Chroniques oasiennes : Ouargla, une histoire et une culture
Selon Paul BLANCHET (1900), les premiers habitants du Sahara sont les « Garamantes ». Les habitants de Ouargla s’appellent les « Madaniyin » probablement des descendants des Garamantes mêlés à des profils beaucoup plus composés (africain et caucasien) car bien des peuples se sont arrêtés à Oued M’ya.
Les Béni Brahim, qui habitent le quartier Nord, seraient des Berbères croisés de Soudanais. Les Béni Ouagguin et les Béni Sissine des quartiers Est et Sud compteraient en outre parmi leurs ancêtres des « Ibâdhites Syriens ». Des Berbères venus du Nord (les Zenâta), au temps des premières conquêtes musulmanes, s’étaient fait place aux côtés des premiers habitants au Xe siècle. C’est la période d’apogée de la vallée qui devint verdoyante depuis Gara krima au Sud à Hassi Feran au nord sur une distance de 40 km.

Vers la fin du XIe siècle, un événement vient bouleverser la paisible cité. Le seigneur de la Kalaa, Mansour Ben El Caïd Ben Hammad, jalousa le pays et le mit en ruine. Le mérite revient aux berbères Kharedjites, Orthodoxes et africains soudanais dans le repeuplement du pays si bien que sa fortune, retrouvée, tenta les turcs en 1554.
Cinquante ans plus tard, les oasiens lassés par l’anarchie qui y régnait firent appel au gouverneur du Maroc qui leur envoya des garnisons. Il y a donc certainement un peu de toutes ces ethnies chez les « Madaniyin ».
Entre 1604 et 1650, la sédentarisation des nomades vient diversifier les tribus en présence. Les premiers nomades à pénétrer la société sont les Ahl Ez Zriba puis les Béni Thour, chassés par la sécheresse de leurs territoires du Djérid en Tunisie. Les Chaamba firent leur apparition à l’Ouest. L’invasion Hilalienne qui débuta en l’an 1049 avec l’invasion Tripolitaine en Lybie va s’établir à Ouargla via leurs descendants : les Saïd Otba et les Mekhadma.
Parmi ces tribus, les Béni Thour s’attachèrent à la terre et prennent gout à l’agriculture. Ils créent des jardins, érigent des maisons et creusent des puits. Cela nous mène à dire un mot de l’agriculture d’antan en guise de trait d’histoire de la région.

Les ouarglis creusèrent plus de 1000 puits dans la seule plaine de Ouargla dont le débit moyen était de l’ordre de 1,6 à 2 litres/seconde. Ces puits jadis « jaillissants » ont vu leur niveau hydrostatique baissé. En 1885, on en comptait 450, onze ans après en 1896 il en restait 257 du fait de l’incrustation des eaux qui en contact des roches calcaire font effondrées les coffrages des puits. Il fallu alors chercher l’eau en creusant des rigoles de plus en plus profondes.
Les jardins situés en contre bas ne purent se débarrasser des eaux excédentaires stagnantes : la fièvre « typhoïde » apparaît et occasionne des dégâts auprès des populations.
Pour autant, le problème n’était pas réglé, l’eau descendait encore et encore. La ruine et la misère guettaient les habitants. L’administration coloniale entrepris alors des travaux de modernisation des moyens d’exhaure de l’eau. En mai 1892, quarante neuf sondages avaient été effectué donnant un débit total de 124 litres / seconde, irrigant 223 ha pour 43451 palmiers.
Le puits de Bala Sghira jaillit en 1898, et profita au Béni Thour avec un débit extraordinaire de 26 litres/seconde à lui seul : de quoi irriguer 30 ha et 6000 palmiers. Mais l’oasis est immense et les mesures ne suffisent pas ce qui eu pour conséquence l’accroissement de la misère.
Sur le plan économique, les impôts si lourds à l’époque (3 fois plus chers pour les sédentaires) et inégalement répartis entre les différentes tranches sociales (moins chers pour les Chaambas et moyen pour les nomades) vont infliger un lourd tribut pour les habitants autochtones.
La carte ci-dessous présente la palmeraie de l’agglomération de Ouargla.

A Ouargla, on remarque que les Béni Thour sont ceux qui ont le plus développé la palmeraie. Disposent-ils d’un savoir-faire et de la volonté qui leur permet de rester attachés à la terre ? Sont-ils loin des conflits de voisinage entre les différentes tribus ? Cette approche ethno-historique permet l’identification d’un point de départ d’un diagnostic par secteur … Béni Thour.